Samedi 04/04/2015 Ranomafana - Massif de l'Andringitra
Qui l’eût cru? La passerelle reliant la ville à la piscine d’eaux thermales est achevée. Nous pouvons donc nous rendre au petit matin à l’établissement de cure. Les nuages sont partout, des écharpes de brume lèchent le relief vert et la ville basse, l’air est saturé d’humidité au point que l’on ne peut pas déterminer si les gouttes montent ou descendent. Dans cet univers d’eau, nous enjambons la rivière bouillonnante et arrivons enfin à à la piscine dont les portes sont ouvertes. Quelques curistes sont arrivés avant nous (il est 8h du matin), des gens de tout âge dont une bonne partie patauge le plus sérieusement du monde à l’abri d’une grosse bouée jaune. Dans le brouillard d’humidité qui nous enveloppe et semble prisonnier des frondaisons de la forêt toute proche, un nuage plus dense encore d’eau chaude s’échappe de la piscine aux eaux à 40°C. Et nous plongeons là dedans, ni une ni deux, après une petite course en maillot de bain qui nous recroqueville comme des cornichons, et laissons la chaleur nous envelopper, puis nous étouffer! Mais c’est un délassement suprême cette eau qui nous détend les chairs, tandis que toute l’eau de la forêt vierge nous tombe sur le visage au bruissement des animaux de la jungle.
Mais il nous faut bien pourtant partir, quoi qu’à contre cœur, car nous commencions à nous plaire dans la région. Nous allons quitter l’est de l’île, ses contreforts de forêts humides qui bloquent les alizées de l’océan indien, pour retrouver les hauts plateaux. Nous allons quitter les ethnies de la forêt (Tanala) et leurs huttes en bois de l’arbre du voyageur, pour les Betsileo et leurs maisons de briques que nous connaissons bien désormais. Sur la route, toujours le même balai de paysans qui vont et qui viennent, une hache ou une bêche à la main, ou encore un colis sur la tête. La route redevient cahoteuse, la forêt devient plus sèche, les nuages se dispersent, bientôt les rizières ont remplacé les arbres, tout devient ordonné en parcelles géométriques, c’en est fini des cultures désordonnées au gré des brûlis sauvages.
Lorsque la voiture ralentit au gré d’un trou plus large que les autres, nous pouvons répondre aux salutations des piétons par un “salam” retentissant, suivi d’un tonitruant “a” ou “o”, en fonction de ce que nous inspirent les visages de nos vis à vis, car ainsi en va-t-il des salutations sur l’île de Madagascar!
Nous passons par Fianarantsoa, point de départ de la ligne de chemin de fer que nous avons empruntée trois jours plus tôt. Nous apprenons qu’aujourd’hui le train n’est tout simplement pas parti, au grand désarroi d’un groupe d’allemands dont l’embonpoint encombre la ville. Deux explications nous sont données :
-la locomotive est en panne et n’a pas la puissance nécessaire pour escalader les côtes.
-c’est aujourd’hui la fête des enfants et le convoi va les promener dans les environs, d’ailleurs un wagon décapotable a été décoré, c’est à dire qu’un wagon de transport de charbon a été camouflé sous des feuilles de bananiers. Toujours est-il que nous visitons la gare qui est un joyau d’architecture provinciale et bourgeoise, et qui est le pendant de celle de Manakara, à la différence qu’ici, les vieilles horloges françaises fonctionnent encore.
Lorsque la voiture ralentit au gré d’un trou plus large que les autres, nous pouvons répondre aux salutations des piétons par un “salam” retentissant, suivi d’un tonitruant “a” ou “o”, en fonction de ce que nous inspirent les visages de nos vis à vis, car ainsi en va-t-il des salutations sur l’île de Madagascar!
Nous passons par Fianarantsoa, point de départ de la ligne de chemin de fer que nous avons empruntée trois jours plus tôt. Nous apprenons qu’aujourd’hui le train n’est tout simplement pas parti, au grand désarroi d’un groupe d’allemands dont l’embonpoint encombre la ville. Deux explications nous sont données :
-la locomotive est en panne et n’a pas la puissance nécessaire pour escalader les côtes.
-c’est aujourd’hui la fête des enfants et le convoi va les promener dans les environs, d’ailleurs un wagon décapotable a été décoré, c’est à dire qu’un wagon de transport de charbon a été camouflé sous des feuilles de bananiers. Toujours est-il que nous visitons la gare qui est un joyau d’architecture provinciale et bourgeoise, et qui est le pendant de celle de Manakara, à la différence qu’ici, les vieilles horloges françaises fonctionnent encore.
Fianarantsoa est une vraie ville, et ressemble à une vraie ville, à la différence des autres localités que nous avons traversées jusqu’ici. Rétrospectivement, le copain de papi Rétif avait eu de la chance d’être nommé là et pas dans une de ces autres bourgades où seuls les bâtiments administratifs sont en dur et dominent un enchevêtrement de maisons de terre collées les unes aux autres. Ici il y a des rues, des bâtiments, des immeubles, des trottoirs, des voitures, des magasins. Et dans cette ville travaille le fameux Pierrot Men, réputé pour ses photos noir et blanc de Madagascar. Nous passons par son atelier où il expose et vend ses clichés. L’homme d’une soixantaine d’années n’est pas très grand, assez sec, et porte une veste en jean. Nous n’osons pas l’interpeller. Ce que nous osons faire en revanche, c’est acheter une cloche en chocolat dans un salon de thé, et que nous réservons pour un peu plus tard. En plus le chocolat de Madagascar est réputé, mais il est difficile d’en trouver, car dans un pays aussi chaud, chocolat rime avec électricité, et l’électricité ne court pas les rues. Deux-trois heures plus tard, il fait tellement chaud que nous n’avons pas d’autre choix que de régler son sort à la cloche.
Jamais cloche de Pâques n’a été engloutie si vite! Mais qu’elle était bonne! Un chocolat onctueux, épais, long en bouche, très doux! Et puis ici on ne triche pas sur la quantité! J’imagine d’ailleurs qu’ils moulent leurs cloches comme leurs cocottes en alu, c’est à dire à la grosse, avec les moyens du bord! Du coup qu’elle est épaisse la cloche! 4mm d’épaisseur en moyenne, et le mouton est plein!
Nous mangeons la cloche à Ambalavao qui est aussi connue pour ses ateliers de fabrication de papier (façon papyrus) et son marché hebdomadaire aux zébus. Celui-ci draine tous les bovins du sud du pays, à pied et en voitures. Voilà pourquoi depuis hier nous croisons troupeau sur troupeau sur la route. Les bouviers et leurs bêtes peuvent parcourir jusqu’à 30km par jour et le paysage présente les stigmates de leur passage, car parfois les zébus ont tracé leurs propres autoroutes , en dehors de la route goudronnée, labourant le vert de la plaine en stries de latérite rouge.
Jamais cloche de Pâques n’a été engloutie si vite! Mais qu’elle était bonne! Un chocolat onctueux, épais, long en bouche, très doux! Et puis ici on ne triche pas sur la quantité! J’imagine d’ailleurs qu’ils moulent leurs cloches comme leurs cocottes en alu, c’est à dire à la grosse, avec les moyens du bord! Du coup qu’elle est épaisse la cloche! 4mm d’épaisseur en moyenne, et le mouton est plein!
Nous mangeons la cloche à Ambalavao qui est aussi connue pour ses ateliers de fabrication de papier (façon papyrus) et son marché hebdomadaire aux zébus. Celui-ci draine tous les bovins du sud du pays, à pied et en voitures. Voilà pourquoi depuis hier nous croisons troupeau sur troupeau sur la route. Les bouviers et leurs bêtes peuvent parcourir jusqu’à 30km par jour et le paysage présente les stigmates de leur passage, car parfois les zébus ont tracé leurs propres autoroutes , en dehors de la route goudronnée, labourant le vert de la plaine en stries de latérite rouge.
A partir d’Ambalavao, le paysage ne se décompose plus qu’en trois couleurs : le vert de l’horizon, le rouge des empreintes de l’homme à travers ce paysage, et le gris du granit qui s’élève de plus en plus en haut sous la forme de monolithes prodigieux, véritables montagnes d’un seul bloc arrondies, au milieu du vert ras des prairies un peu maigres. Là où l’homme cultive, marche, construit, la latérite sous jacente réapparaît.
Si jusqu’ici le paysage avait toujours été vallonné, c’était dans un relief assez dense, où la végétation et les cultures resserraient les perspectives. Dorénavant tout est large, vert, arrondi. Le regard se perd très loin, sur une barrière de montagne qui représente notre objectif, et surtout illustre bien la géologie locale : c’est une herse de pains de sucre granitiques! Pour les rejoindre il faut quitter la route où d’ailleurs nous ne croisions plus grand monde, à l’exception de quelques camions Mercedes ou Bedford survivants d’une époque antédiluvienne. Cap au sud est, sur une piste de 25 kilomètre.
Si jusqu’ici le paysage avait toujours été vallonné, c’était dans un relief assez dense, où la végétation et les cultures resserraient les perspectives. Dorénavant tout est large, vert, arrondi. Le regard se perd très loin, sur une barrière de montagne qui représente notre objectif, et surtout illustre bien la géologie locale : c’est une herse de pains de sucre granitiques! Pour les rejoindre il faut quitter la route où d’ailleurs nous ne croisions plus grand monde, à l’exception de quelques camions Mercedes ou Bedford survivants d’une époque antédiluvienne. Cap au sud est, sur une piste de 25 kilomètre.
Une vraie piste! Il parait que les 405 peuvent l’emprunter. Il paraît… Il ne faut pas trop tenir à sa 405 selon moi, pour l’amener dans un tel guet-apens. Premièrement, nous avons mis un peu plus d’une heure pour parcourir les 25km. Deuxièmement, pas un instant le plancher de la voiture n’a été à l’horizontale. Il faut dire que la piste louvoie, monte, redescend, alors que eau, zébus, camions, voitures, piétons, y ont tracé leurs lits respectifs. D’ailleurs nombreux sont les piétons, et par moment ils nous forment une haie, car ils redescendent de l’embranchement de la route où se tenait un grand marché. Vers la fin, nous en doublons un qui se coltine sur la tête une télé à écran cathodique! 25 kilomètres! Même Hercule n’aurait pas été capable d’une telle prouesse! En même temps, les malgaches sont bien organisés et sur la route des tables protégées du soleil par des bâches sont dressées. Les attroupements autour ont quelque chose de fête au village, mais dans le vide de la plaine. En fait ce sont des ravitaillements informels pour ces villageois qui s’en retournent chez eux, ravitaillements en rhum, cela va sans dire!
Enfin, finalement, nous arrivons au lieu de notre séjour, Camp Catta, au pied d’une muraille de légende, grise et lisse, une sorte de coulée granitique de 300m de haut, qui verrouille complètement le fond de la vallée. A côté de ce mur tolkenien se dresse dans le même matériau, un autre bloc, moins lisse, et pyramidal. Un amas de blocs à son sommet donne l’illusion qu’un caméléon veille sur le débouché de la vallée. L’autre versant est gardé par un contrefort gris, moins haut que la falaise, mais régulier comme un rempart crénelé. Les nuages sont bloqués derrière et semblent faire pression pour venir de notre côté. L’ironie de l’impossibilité de leur traversée est renforcée par l’éclairage blafard que leur jette la lune qui les domine et paraît les surveiller.
Enfin, finalement, nous arrivons au lieu de notre séjour, Camp Catta, au pied d’une muraille de légende, grise et lisse, une sorte de coulée granitique de 300m de haut, qui verrouille complètement le fond de la vallée. A côté de ce mur tolkenien se dresse dans le même matériau, un autre bloc, moins lisse, et pyramidal. Un amas de blocs à son sommet donne l’illusion qu’un caméléon veille sur le débouché de la vallée. L’autre versant est gardé par un contrefort gris, moins haut que la falaise, mais régulier comme un rempart crénelé. Les nuages sont bloqués derrière et semblent faire pression pour venir de notre côté. L’ironie de l’impossibilité de leur traversée est renforcée par l’éclairage blafard que leur jette la lune qui les domine et paraît les surveiller.