Samedi 28 mai 2016.
Hier soir un groupe d’allemands à rejoint l’hôtel. Deux bus ralliant Hambourg à Shanghai. D’un certain côté c’est un beau voyage qu’ils font! Toute la route de la Soie en passant par Volgograd, Samarkand, Lanzhou! En plus des conférenciers (comme nous en avons le témoignage en direct) viennent leur exposer la culture, l’histoire des pays et des musiciens interprètent des musiques traditionnelles. Mais ce sont des allemands! Jusqu’à minuit, terrés dans notre yourte, nous avons l’impression d’être cernés par tout l’état major de la Wehrmacht dansant la farandole des chaises de la Grande Vadrouille!
Ein Jäger aus Kurpfalz,
Der reitet durch den grünen Wald,
Er schießt das Wild daher,
Gleich wie es ihm gefällt.
Et puis jusqu’à une heure du matin il faut ranger les reliefs de la fête, et les serveurs ne s’embarrassent pas de silence. Or dès 4h les chiens aboient dans la ville et à 5h, les oiseaux reprennent leur concert matinal. A 6h30 les premiers allemands sont de retour, notamment deux qui ne font pas partie du groupe mais ont établi leur camp de base devant notre yourte depuis que nous sommes arrivés : un père et son fils ; ils s’enquillent des bières du matin jusqu’au soir, mutique, l’œil sombre et jaune. On dirait qu’ils attendent l’orage. Mais depuis que le bus d’allemands est arrivé, ils expriment une joie éructante que leur timbre germanique pollué par le tabac et l’alcool rapprochent du son du métro arrivant en gare.
Bref on n’a pas beaucoup dormi. Il nous faut pourtant partir pour Buchara. Rendez-vous à la gare routière à 6km au sud de la ville. Comme de bien entendu, nous ne sommes pas encore sortis du taxi que c’est la foire d’empoigne autour de nous, pour savoir qui nous emmènera personne ne sait encore où! Pour Buchara, deux chauffeurs de taxi collectif sont au coude à coude, pour ne pas dire qu’ils sont pas loin d’en être aux poings. L’un demande 280 000 et part immédiatement. L’autre est à 250 000 a déjà quelqu’un dans sa voiture, et attend donc une quatrième personne pour partir. Cette version nous semble un peu plus conforme à l’expression du commerce ouzbek. On descend donc à 200000 et c’est d’accord. Mais l’autre chauffeur est vraiment énervé, c’est l’esclandre à la gare routière. Heureusement, l’autre cliente de la voiture nous rassure en nous disant que nous avons fait le bon choix. Et puis finalement notre chauffeur décide qu’il en a marre d’attendre et nous partons. Le concurrent malheureux nous accompagne pendant quelques kilomètres, exprimant son courroux par de houleuses queues de poissons, et puis le voyage peut commencer normalement.
Nous quittons l’Amou Daria qui part se cacher derrière des collines plus au sud et le paysage devient désertique. Nos yeux se ferment. Quand nous les rouvrons ponctuellement, nous sommes entourés de tas de terre et des touffes d’herbes à chameau, puis une plaine à l’infini comme nous en vîmes en Namibie, puis des rails au milieu de nulle part avec un train à l’arrêt, sans locomotive, mais chargé d’un colis spécial qui ne peut être qu’une turbine de centrale nucléaire ou de barrage. Cette fois ci, c’est une forteresse en terre à la frontière des terres irriguées qui sont réapparues. Cette fois là ce sont des femmes et des hommes penchés sur les plantations de coton et les taillant à la serpette. Et puis une dernière fois, notre voiture s’arrête, le chauffeur doit charger deux nouveaux clients. Au bout de quelques minutes il se ravise et nous transfère dans une autre voiture ; vogue la galère, nous sommes repartis! Pour cette deuxième partie du voyage, nous traversons le désert entre Buchara et Ourgentch. Une deux fois deux voies en béton toute neuve, du sable jaune, des dunes et de l’herbe à chameaux. Loin au sud parfois on discerne l’Amou Daria paresseuse. Mais là bas, au Turkménistan, elle semble n’intéresser personne et traverse le désert, silencieuse. Des boules d’herbes sèches traversent la route. Lorsque l’Amou Daria se rapproche, on peut observer le pays tel qu’il était avant, quand il n’était pas recouvert de canaux, et tel qu’Alexandre le Grand a du le découvrir il y a 2400 ans. Le ciel immensément bleu, le sol immensément jaune, le tout baigné d’une chaleur suffocante. Et un miroitement. Une bande de vie qui serpente entre des falaises et des marécages, le bleu de l’eau sur une surface si large qu’elle semble tout envahir, des îles recouvertes de vert. Parfois les lacets du fleuve se rejoignent pour faire un lac immense, autour duquel se développe une oasis. Sur un tel endroit, il y a trois mille ans, on aurait bâti une forteresse!
Le téléphone du chauffeur sonne sans arrêt : ce sont les enchères qui montent pour le prochain match de la ligue des champions, le real Madrid a la côte, et les côtes justement se font en dollars!
Les camions que l’on croise se voient de loin : sur la route en béton le ciel se reflète comme dans un miroir, et tandis que nous nous élançons vers l’infini, les camions quant eux semblent comme figés dans l’air.
La chaleur est étouffante, on ne peut pas ne pas s’endormir, la question est comment fait le chauffeur?
Nous déposons une voyageuse sur la route de Buchara. Depuis la grand route on imaginait mal que l’on puisse habiter quelque part dans l’immensité désolée qui nous entoure. Ce n’est que sable et herbes sèches. Et pourtant nous bifurquons à 90° à droite et fonçons à 120 km/h sur une sorte de petite route communale à travers le désert. Soudain nous bondissons par dessus un petit canal. Une voiture était garée dans les buissons, un homme se baigne. Finalement au bout de 10 km/h de tout droit parmi les herbes, nous voyons un dôme approcher. Cette chaleur sèche, notre vitesse démesurée sur les routes abandonnées, et maintenant ce hameau réduit à des squelettes de bâtiments autour d’une mosquée de terre, tout ceci évoque Mad Max. Mais lorsque nous sortons de la voiture pour aider la jeune femme à porter ses paquets jusqu’à l’ombre de la mosquée dans un silence de mort, nous sommes plus dans du Ennio Morricone. Derrière les fenêtres des deux bâtiments en long, on devine des regards, mais tout est immobile, si ce n’est le vent que paradoxalement nous n’entendons pas. Une demi douzaine de voitures sont dispersées aux alentours sous des bâches jaunies. Et comme nous approchons de la mosquée, une petite foule d’une dizaine d’individus en sort et nous entoure. Quelques mots, quelques pas, et déjà ils ont disparu. Nous voici maintenant devant l’imam rondouillard aux dents d’or. Et à la peau rose qui dessine les continents de son vitigo. Il accueille la jeune femme qui plus tôt m’avait aidé à me débrouiller au resto, et ils disparaissent ensemble sous le portail de la mosquée. Une fille tout ce qu’il y a de plus moderne, elle disparaît là avec un baluchon, son sac de couchage et 15L d’eau, on se demande bien ce qu’elle vient chercher là.
Ein Jäger aus Kurpfalz,
Der reitet durch den grünen Wald,
Er schießt das Wild daher,
Gleich wie es ihm gefällt.
Et puis jusqu’à une heure du matin il faut ranger les reliefs de la fête, et les serveurs ne s’embarrassent pas de silence. Or dès 4h les chiens aboient dans la ville et à 5h, les oiseaux reprennent leur concert matinal. A 6h30 les premiers allemands sont de retour, notamment deux qui ne font pas partie du groupe mais ont établi leur camp de base devant notre yourte depuis que nous sommes arrivés : un père et son fils ; ils s’enquillent des bières du matin jusqu’au soir, mutique, l’œil sombre et jaune. On dirait qu’ils attendent l’orage. Mais depuis que le bus d’allemands est arrivé, ils expriment une joie éructante que leur timbre germanique pollué par le tabac et l’alcool rapprochent du son du métro arrivant en gare.
Bref on n’a pas beaucoup dormi. Il nous faut pourtant partir pour Buchara. Rendez-vous à la gare routière à 6km au sud de la ville. Comme de bien entendu, nous ne sommes pas encore sortis du taxi que c’est la foire d’empoigne autour de nous, pour savoir qui nous emmènera personne ne sait encore où! Pour Buchara, deux chauffeurs de taxi collectif sont au coude à coude, pour ne pas dire qu’ils sont pas loin d’en être aux poings. L’un demande 280 000 et part immédiatement. L’autre est à 250 000 a déjà quelqu’un dans sa voiture, et attend donc une quatrième personne pour partir. Cette version nous semble un peu plus conforme à l’expression du commerce ouzbek. On descend donc à 200000 et c’est d’accord. Mais l’autre chauffeur est vraiment énervé, c’est l’esclandre à la gare routière. Heureusement, l’autre cliente de la voiture nous rassure en nous disant que nous avons fait le bon choix. Et puis finalement notre chauffeur décide qu’il en a marre d’attendre et nous partons. Le concurrent malheureux nous accompagne pendant quelques kilomètres, exprimant son courroux par de houleuses queues de poissons, et puis le voyage peut commencer normalement.
Nous quittons l’Amou Daria qui part se cacher derrière des collines plus au sud et le paysage devient désertique. Nos yeux se ferment. Quand nous les rouvrons ponctuellement, nous sommes entourés de tas de terre et des touffes d’herbes à chameau, puis une plaine à l’infini comme nous en vîmes en Namibie, puis des rails au milieu de nulle part avec un train à l’arrêt, sans locomotive, mais chargé d’un colis spécial qui ne peut être qu’une turbine de centrale nucléaire ou de barrage. Cette fois ci, c’est une forteresse en terre à la frontière des terres irriguées qui sont réapparues. Cette fois là ce sont des femmes et des hommes penchés sur les plantations de coton et les taillant à la serpette. Et puis une dernière fois, notre voiture s’arrête, le chauffeur doit charger deux nouveaux clients. Au bout de quelques minutes il se ravise et nous transfère dans une autre voiture ; vogue la galère, nous sommes repartis! Pour cette deuxième partie du voyage, nous traversons le désert entre Buchara et Ourgentch. Une deux fois deux voies en béton toute neuve, du sable jaune, des dunes et de l’herbe à chameaux. Loin au sud parfois on discerne l’Amou Daria paresseuse. Mais là bas, au Turkménistan, elle semble n’intéresser personne et traverse le désert, silencieuse. Des boules d’herbes sèches traversent la route. Lorsque l’Amou Daria se rapproche, on peut observer le pays tel qu’il était avant, quand il n’était pas recouvert de canaux, et tel qu’Alexandre le Grand a du le découvrir il y a 2400 ans. Le ciel immensément bleu, le sol immensément jaune, le tout baigné d’une chaleur suffocante. Et un miroitement. Une bande de vie qui serpente entre des falaises et des marécages, le bleu de l’eau sur une surface si large qu’elle semble tout envahir, des îles recouvertes de vert. Parfois les lacets du fleuve se rejoignent pour faire un lac immense, autour duquel se développe une oasis. Sur un tel endroit, il y a trois mille ans, on aurait bâti une forteresse!
Le téléphone du chauffeur sonne sans arrêt : ce sont les enchères qui montent pour le prochain match de la ligue des champions, le real Madrid a la côte, et les côtes justement se font en dollars!
Les camions que l’on croise se voient de loin : sur la route en béton le ciel se reflète comme dans un miroir, et tandis que nous nous élançons vers l’infini, les camions quant eux semblent comme figés dans l’air.
La chaleur est étouffante, on ne peut pas ne pas s’endormir, la question est comment fait le chauffeur?
Nous déposons une voyageuse sur la route de Buchara. Depuis la grand route on imaginait mal que l’on puisse habiter quelque part dans l’immensité désolée qui nous entoure. Ce n’est que sable et herbes sèches. Et pourtant nous bifurquons à 90° à droite et fonçons à 120 km/h sur une sorte de petite route communale à travers le désert. Soudain nous bondissons par dessus un petit canal. Une voiture était garée dans les buissons, un homme se baigne. Finalement au bout de 10 km/h de tout droit parmi les herbes, nous voyons un dôme approcher. Cette chaleur sèche, notre vitesse démesurée sur les routes abandonnées, et maintenant ce hameau réduit à des squelettes de bâtiments autour d’une mosquée de terre, tout ceci évoque Mad Max. Mais lorsque nous sortons de la voiture pour aider la jeune femme à porter ses paquets jusqu’à l’ombre de la mosquée dans un silence de mort, nous sommes plus dans du Ennio Morricone. Derrière les fenêtres des deux bâtiments en long, on devine des regards, mais tout est immobile, si ce n’est le vent que paradoxalement nous n’entendons pas. Une demi douzaine de voitures sont dispersées aux alentours sous des bâches jaunies. Et comme nous approchons de la mosquée, une petite foule d’une dizaine d’individus en sort et nous entoure. Quelques mots, quelques pas, et déjà ils ont disparu. Nous voici maintenant devant l’imam rondouillard aux dents d’or. Et à la peau rose qui dessine les continents de son vitigo. Il accueille la jeune femme qui plus tôt m’avait aidé à me débrouiller au resto, et ils disparaissent ensemble sous le portail de la mosquée. Une fille tout ce qu’il y a de plus moderne, elle disparaît là avec un baluchon, son sac de couchage et 15L d’eau, on se demande bien ce qu’elle vient chercher là.
Voici enfin Buchara, cette cité mythique, le phare et l’aimant de la route de la soie! Nous trouvons ou plutôt notre chauffeur nous trouve un B&B en plein centre historique mais en retrait de la place principale, dans une maison organisée autour d’une cour à étage et animée par une mami énorme dans son fameux fichu fleuri. Elle nous offre un thé brûlant et des sucreries pour nous accueillir. Cet accueil est le bienvenu car ça fait déjà plusieurs heures que nous nous sentons complètement desséchés. Le thé brûlant permet d’assouvir la soif (sur le moment tout du moins) en quelques gorgées ; la chaleur du breuvage assomme le voyageur qui se retrouve KO sur sa natte à écouter au loin le brouhaha diffus de la fête. Il profite de la fraîcheur bienfaitrice qui inonde son corps lorsque le souffle de vent parcourant le patio rencontre le flot de sa transpiration : à la première gorgée de thé tombant dans la gorge, les digues se sont ouvertes.
Je parle du bruit de la fête car un événement culturel bat en ce moment son plein, qui draine des milliers de touristes ouzbeques et d’Asie centrale. Pensez-vous, nous avons même rencontré dans notre B&B un club de mamans turkmènes venues faire la nouba! Elles nous encouragent même à venir l’année prochaine en 2017 pour des jeux olympiques d’Asie centrale. A cette occasion, obtenir un visa devrait être plus facile, car Dieu sait que le Turkménistan est un état policier fermé et que sa politique de visas est aléatoire. Les femmes turkmènes ont l’air de grossir avec l’âge dans les mêmes proportions que les femmes ouzbeques, mais elles ont une garde robe recherchée, et des coiffes à multiples couches qui sont de véritables invitations au voyage. D’ailleurs un autre détail qu’elles nous ont conté nous a, par sa seule vocation, dépaysé : au Turkménistan les petites ruelles n’existent pas. Que des rues larges et des boulevards, même dans les villes très anciennes! C’est le fruit d’une culture millénaire basée sur le nomadisme et la conquête des grands espaces! Bouchara au contraire est un éperon sédentaire dans l’espace nomade de l’Asie centrale, ce qui lui a d’ailleurs valu le privilège de se faire raser un paquet de fois. Et pour mettre tous ces sédentaires en sécurité, on les resserre entre des remparts. D’où ces différences d’urbanisme.
Musique à fond, stands de souvenirs et d’artisanat, écrans géants qui diffusent de la musique sirupeuse, cirque de M. Loyal, spectacles de danse et de musique, autant de propositions qui changent des ballades dans les parcs pour les citadins et des ballades dans les champs pour les ruraux. Du coup les occidentaux avec leurs gros appareils photos sont perdus dans la foule et passent totalement inaperçus parmi les festivaliers ; on ne leur prête aucune attention, à part bien sûr celle louable de multiplier les prix par deux à leur approche, mais c’est de bonne guerre. Ce festival permet de découvrir la ville par ses ruelles car une grande scène a été installée devant la mosquée du vendredi et le quartier a été bouclé par un cordon continu de policiers en vert. Dès lors force est de s’enfoncer dans le lazzi des ruelles, de jeter un œil dans les cours, de saluer les grand-mères qui scrutent les enfants qui jouent, les mamans qui font un peu des deux. Au fur et à mesure que le jour décline, la poussière qui s’élève des quartiers dore et enveloppe les silhouettes d’un halo onirique ; les murs de boue deviennent héroïques, et les faïences d’azur des mosquées et médersas chantent à l’âme!
C’est cette lumière sereine et magique qui a de tout temps enchanté les voyageurs, surtout après la traversée de quatre cent kilomètres de désert, lorsqu’enfin ils s’affalent heureux, les pieds dans une fontaine.
Je parle du bruit de la fête car un événement culturel bat en ce moment son plein, qui draine des milliers de touristes ouzbeques et d’Asie centrale. Pensez-vous, nous avons même rencontré dans notre B&B un club de mamans turkmènes venues faire la nouba! Elles nous encouragent même à venir l’année prochaine en 2017 pour des jeux olympiques d’Asie centrale. A cette occasion, obtenir un visa devrait être plus facile, car Dieu sait que le Turkménistan est un état policier fermé et que sa politique de visas est aléatoire. Les femmes turkmènes ont l’air de grossir avec l’âge dans les mêmes proportions que les femmes ouzbeques, mais elles ont une garde robe recherchée, et des coiffes à multiples couches qui sont de véritables invitations au voyage. D’ailleurs un autre détail qu’elles nous ont conté nous a, par sa seule vocation, dépaysé : au Turkménistan les petites ruelles n’existent pas. Que des rues larges et des boulevards, même dans les villes très anciennes! C’est le fruit d’une culture millénaire basée sur le nomadisme et la conquête des grands espaces! Bouchara au contraire est un éperon sédentaire dans l’espace nomade de l’Asie centrale, ce qui lui a d’ailleurs valu le privilège de se faire raser un paquet de fois. Et pour mettre tous ces sédentaires en sécurité, on les resserre entre des remparts. D’où ces différences d’urbanisme.
Musique à fond, stands de souvenirs et d’artisanat, écrans géants qui diffusent de la musique sirupeuse, cirque de M. Loyal, spectacles de danse et de musique, autant de propositions qui changent des ballades dans les parcs pour les citadins et des ballades dans les champs pour les ruraux. Du coup les occidentaux avec leurs gros appareils photos sont perdus dans la foule et passent totalement inaperçus parmi les festivaliers ; on ne leur prête aucune attention, à part bien sûr celle louable de multiplier les prix par deux à leur approche, mais c’est de bonne guerre. Ce festival permet de découvrir la ville par ses ruelles car une grande scène a été installée devant la mosquée du vendredi et le quartier a été bouclé par un cordon continu de policiers en vert. Dès lors force est de s’enfoncer dans le lazzi des ruelles, de jeter un œil dans les cours, de saluer les grand-mères qui scrutent les enfants qui jouent, les mamans qui font un peu des deux. Au fur et à mesure que le jour décline, la poussière qui s’élève des quartiers dore et enveloppe les silhouettes d’un halo onirique ; les murs de boue deviennent héroïques, et les faïences d’azur des mosquées et médersas chantent à l’âme!
C’est cette lumière sereine et magique qui a de tout temps enchanté les voyageurs, surtout après la traversée de quatre cent kilomètres de désert, lorsqu’enfin ils s’affalent heureux, les pieds dans une fontaine.